Oeuvre hypermédiatique
We Are Fragmented
Auteur·e·s de la fiche: 

We are fragmented (2017), de l’artiste égyptienne Amira Hanafi, est une œuvre commissionnée par le Centre for Applied Human Rights - University of York, plus précisément dans le cadre d’un projet de recherche intitulé Navigating Risk, Managing Security, and Receiving Support. L’œuvre est une modélisation des données préalablement obtenues dans le cadre d’une recherche de terrain interdisciplinaire à la croisée des sciences humaines et des sciences juridiques. Cette enquête du centre avait pour objectif de récolter, sous forme d’entrevues, les témoignages de différents activistes militant pour les droits humains dans différents pays à risques (Colombie, Kenya, Mexique, Indonésie, Égypte). Les entrevues portent sur l’expérience des activistes en termes de sécurité, plus précisément sur le « risk management » que requièrent leurs environnements de travail respectifs.

À partir des données qui ont été récoltées, Amira Hanafi a créé une banque de données (http://wearefragmented.amiraha.com/), organisée par émotions (couleurs) ou par région géographiques, qui permet de lire ces témoignages et de naviguer entre eux selon différents critères de classification.

Relation au projet: 

L’œuvre répond aux préoccupations du projet de multiples façons. D'abord, c'est au quotidien des divers intervenants que s'intéressent les entrevues menées au cours de l'enquête du Centre for Applied Human Rights. Ensuite, par son visuel, l'œuvre reprend de manière évidente et immédiatement perceptible un imaginaire de l’accumulation et de l’organisation des informations. Pourtant, la base de données imaginée par Hanafi n'a pas pour seul objectif de compiler les témoignages pour laisser voir la masse imposante qu'elles représentent, puisque l'artiste nous donne accès aux entrevues originelles. L'archivage est donc effectué dans un souci de ne pas réduire l'expérience sensible à un amas qui ne fait sens que dans une optique d'accumulation. 

Enfin, cette particularité de l'œuvre (conserver l'épaisseur des expériences, rendre sensible leur caractère irréductible tout en nous permettant de les visualiser comme un ensemble) participe du caractère inépuisable des quotidiens qui sont relatés par les participants puisqu'elle nous place, en tant que spectateur, dans une posture active de «chercheur», étant donné que nous devons naviguer à travers les extraits épars de We are Fragmented selon un parcours arbitraire et non-linéaire dont on voit difficilement la fin.

S'épuisent aussi les approches possibles d'un même ensemble d'informations. We are Fragmented  est une œuvre fondée sur une réelle recherche de terrain, ici réemployée par Hanafi à des fins artistiques (sans se départir de la dimension éthique du projet original). L’œuvre permet donc de penser les modélisations de l’information, mais aussi de penser les rapprochements et les écarts, à partir de mêmes collectes de données, entre une proposition plus sociologique et une autre, davantage esthétique.

Cette œuvre est incluse dans l'exposition en ligne Re|Search du collectif Archiver le présent.

Discours / Notes: 

This digital artwork was commissioned by the Centre for Applied Human Rights at the University of York, as part of the Navigating Risk, Managing Security, and Receiving Support research project.

It was made in response to research conducted in five countries (Colombia, Egypt, Indonesia, Kenya, and Mexico), where researchers spoke with human rights defenders around issues of security, wellbeing, and perceptions of ‘human rights defenders’ in their countries.

Reading through these transcribed and anonymized interviews, I was struck by the range and depth of emotions expressed. The speakers’ experiences resonated with me in their resemblance to the emotions I feel as a practicing artist in Egypt. This website translates my reading of these interviews into visual patterns, through a system of classifying sentences by emotions expressed and evoked.

The title of this work (we are fragmented) is taken from the words of one of the human rights defenders who participated in the research. 

[…]

After reading through the interviews that were shared with me, I created a classification system to coincide with the range of emotions I read in the text. I based my classification system on a few popularclassification systems. It contains a set of 6 parent emotions, each with 6 subcategories, for a total of 36 classifications.

Reading the interviews again, I recorded my emotional experience by classifying sentences to which I had an emotional reaction, or in which the speaker explicitly expressed an emotion. It was a highly subjective exercise. Ultimately, this website offers personal maps of my reading of the research material, processed through language and emotion.

Alongside my visual interpretation of the research, you can directly access the source material for each classification on this site. Click on any colored circle, and you will see the direct quote from the individual defender on which that classification is based. I hope for this work to give an alternate way of reading through the research shared with me by Juliana Mensah and Alice Nah.