Variabilité, mutation, instabilité des créations contemporaines
Appel à communications
15 novembre 2018

VARIABILITÉ, MUTATION, INSTABILITÉ DES CRÉATIONS CONTEMPORAINES
Colloque international du CIEREC (Université Jean Monnet, Saint-Etienne) en partenariat avec le LESA (Aix-Marseille Université)
Organisé par Christine Buignet, Anne Favier et Carole Nosella
3-4 juin 2019

L’objet de ce colloque sera de penser les différents paramètres pouvant conduire à envisager certaines créations contemporaines comme variables. Cette variabilité peut être engendrée par une forme d’instabilité des productions artistiques actuelles, à l’image d’un monde parcouru de flux, dans lequel le changement est permanent, et dont l’écosystème vacille sous l’effet de l’accélération des modes de circulations. La variabilité peut à son tour engendrer la mutation des formes, qui changeant de supports, d’espaces, de configurations, voient leurs statuts et parfois même leurs sens transformés.

Il s’agira de considérer la variabilité de l’oeuvre comme constitutive de celle-ci, c’est-à-dire inscrite dans le protocole de création artistique. On peut citer à titre d’exemple A journey that wasn’t de Pierre Huyghes. On peut également évoquer le récent projet de Clément Cogitore, Braguino ou la communauté impossible, qui a fait l’objet d’une exposition, d’un film documentaire et d’un livre; ces émanations – autonomes – peuvent dialoguer et s’enrichir les unes les autres. Dès lors, on pourra se demander comment les artistes proposent des occurrences multiples d’un même projet prenant différentes formes et temporalités et remettent en cause toute complétude et détermination. Ces oeuvres en instance de formulations et prenant formes dans des médiums différents peuvent réfléchir les pratiques transmédiatiques de l’industrie culturelle, mais invitent également à penser l’oeuvre en lien avec son écosystème.

En effet une autre manière d’envisager la variabilité des oeuvres, leur instabilité et leur mutation est de penser leurs supports et lieux d’inscription. Le phénomène numérique touchant aujourd’hui une large part des productions audio (et/ou) visuelles, a pour effet de transformer la nature des oeuvres. Comme le précise Lev Manovich, «L’image numérique étant une image matrice, elle est par essence variable, sa visualisation est toujours issue d’un calcul, selon des paramètres propres au milieu qui la fait apparaître (selon le logiciel, l’écran utilisé par exemple)». Ainsi «un objet néomédiatique, plutôt que d’être à l’origine d’exemplaires identiques, donne naissance à plusieurs versions différentes.» Nous sommes toujours face à une traduction, une version d’un objet dont la manifestation varie selon différents paramètres. De plus, les problématiques de compatibilité et d’obsolescence des médiums technologiques incitent les artistes à multiplier les formats de leurs productions, à des fins de conservation mais aussi d’exploration esthétique. Cette variabilité des supports engendre une mutation des oeuvres qu’il s’agira d’explorer.

En outre, ce phénomène de variabilité a un effet sur la présentation et l'exposabilité des oeuvres. Déjà, l’oeuvre conceptuelle Schéma, 1966-1970 de Dan Graham, s'auto-déterminait dans une nouvelle version en fonction de ses divers espaces de publication. À propos des «Nouvelles histoires de fantômes» de Georges Didi-Huberman et Arno Gisinger, Marie-Odile Lanctôt-David parle d’expositions à l’ère de leur reproduction technique. On pourra ainsi s’interroger sur la variabilité dans l’installation, l’exposition et ses effets sur la réception. La récente exposition de Neil Béloufa au palais de Tokyo est à ce titre exemplaire; l’artiste évoque en ce sens une «expo qui bouge tout le temps» et où «le sens est mobile». Le spectateur est alors à l'épreuve de l'instabilité et de l'incomplétude des manifestations plastiques et de leurs significations.

Enfin, s’interroger sur la variabilité des oeuvres permet de penser leurs circulations à travers les réseaux, leur «transit» d’un espace de monstration à un autre qui engendre transformations et mutations d’oeuvres multiformes et augmentées.

Ces questionnements, s’ils prennent d’autant plus sens dans le contexte numérique actuel, sont à l’oeuvre dans de nombreuses démarches artistiques plasticiennes à travers des médiums variés et pouvant relever de l'installation, de la performance ou encore du livre d'artiste. Ils peuvent également concerner les arts de la scène, le design, la musique, ou encore la littérature.

Ainsi cet appel à communication s’adresse aux chercheurs en arts plastiques, en sciences de l’art, en histoire de l’art, en esthétique, en design et en arts du spectacle; il peut intéresser aussi des chercheurs en musicologie, littérature…

Les propositions pourront porter sur des études de cas, des tentatives typologiques, des questions théoriques, etc. L’orientation artistique de ce colloque amènera à considérer des formes diverses (tels que conférence-performance, pratiques artistiques théorisées, entretiens préparés – par exemple entre un artiste et un théoricien –, etc.)

Les propositions (maximum 2500 signes et un titre), accompagnées d’une brève notice biographique, devront être adressées avant le 15 novembre 2018 aux organisatrices du colloque. Elles seront ensuite examinées par le Comité scientifique.

christine.buignet@univ-amu.fr ; anne.favier@univ-st-etienne.fr ; carole.nosella@univ-st-etienne.fr